On m'appelait autrefois "Longa Calma", mais il y a très très longtemps ; cela signifiait, dans le langage du VIIème siècle, "un long pâturage". Au début des années 1100, on cite aussi le nom "Longo-Camelo"... Mon histoire, en effet, remonte à plusieurs siècles. En 732, pârait-il, les Sarrazins traversèrent mon territoire, à une époque où mes terres étaient encore presques désertiques : seuls quelques chalets, disposés au milieu depâturages, témoignaient d'une activité limitée à la belle saison. Mes premiers habitants redescendaient dans la plaine, avec leurs troupeaux, pendant les rudes mois d'hiver. Et sans doute les moines de l'abbaye de Condat (qui devient Saint-Claude au XIIème siecle) sont-ils à l'origine des premiers défrichements : ne dit-on pas qu'on pouvait aller de Lutèce (Paris) à la Mer Bleue continuellement à l'ombre des feuillus ? En 1349, je faillis bien être rayée de la carte de Franche-Comté à la suite d'une terrible épidémie de peste ; et je ne suis pas près d'oublier ce gigantesque incendie qui me réduisit en cendres ...
Mais voilà que le 17 juin 1607, naissait Claude Prost, plus connu sous le nom de LACUZON, celui qui allait devenir le «défenseur des causes perdues», mais aussi le célèbre héros du livre «Le Médecin des Pauvres» de Xavier de Montépin. Et l'enfant du pays, ce brigand qui incarnait si bien l'esprit d'insoumission des Franc-Comtois, participa très activement à la défense de la Franche-Comté, alors espagnole, contre les soldats de Richelieu, et ce n'est qu'en 1678 que mon territoire fut annexé à la France.
Meurtrie, ensanglantée, je réussis malgré tout à survivre et, en 1827, on recense 2157 habitants qui vivent des produits de la terre ; pourtant, et faisant preuve d'une ingéniosité et d'un courage exemplaires, quelques Chaumerands (c'est encore aujourd'hui, le nom de mes habitants) se lancèrent dans l'activité artisanale et arrivèrent à faire de ma petite cité la «capitale de la mesure linéaire» au début de XXème siècle et jusqu'au début des années 60.
Puis mon existence fut à nouveau en danger, suite au dépeuplement qui fit tomber ma population à 671 en 1975. Une fois encore, mon coeur ne voulut pas s'arrêter de battre et, au cours de ces vingt dernières années, le nombre de mes habitants ne cesse d'augmenter pour atteindre aujourd'hui 1178, le nombre des classes de l'école passant dans le même temps de 3 à 6 ; lotissements, appartements rénovés, activité industrielle et agricole, vie associative, commerce, tourisme, font de moi un lieu privilégié. Je m'étends sur 5700 ha et suis encore recouverte par 3200 ha de forêts de sapins, d'épicéas et de hêtres : c'est dire si ma réserve d'oxygène est grande !